on ne peut arrêter le flot des vagues, mais on peut apprendre à surfer. J.Kabat-Zinn
Nous savons toutes que la vie est tout sauf un long fleuve tranquille… et pourtant nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour éviter les vagues et gérer les désastres de nos tsunamis personnels.
C’est facile, depuis la période new age, chacun y va de sa technique et de ses méthodes. De la pensée positive à l’hypnose en passant par l’étude des vies antérieures, toutes promettent le bonheur; il suffit de surfer un peu sur internet ou d’aller chez ton libraire favori, pour y dénicher la nouvelle « bible » qui saura te faire oublier ta condition difficile d’être humain.
Et tant mieux quelque part, car il est grand temps que les gens se secouent et se prennent en main; seulement voilà, il y a un HIC… il vaut mieux cesser de croire que le bonheur est servi par une accumulation de techniques bien maitrisées. En tous les cas pour moi cela n’a jamais fonctionné et j’ai à mon compte un bon nombre d’ateliers, de cours, de techniques et de théories effectuées… non ce qui a fonctionné pour moi, c’est de réaliser que je suis dans un processus et qu’en me fondant dans ce processus je suis une femme heureuse.
Je me dis souvent » et si finalement toutes ces techniques étaient juste un moyen qu’ont trouvé ceux qui se sont véritablement engagés dans un processus de changement, d’exprimer la magie de l’éveil, du nirvana, de l’extase auxquels ils ont goûté? qu’il n’y a pas vraiment une technique pour y parvenir, que c’est juste quelque chose qui est là à disposition et dans lequel il suffit de se laisser aller? »
Dans ce mouvement de « clé du bonheur » et autres « voies spirituelles » il y en a pour tous les goûts; aujourd’hui j’ai été inspirée par un article de Psychologie.com, intitulé « les 7 leçons sur la surf atitude« … ça m’a d’autant bien parlé, que le surf pour moi, c’est typiquement se fondre dans le processus.
Ces 7 leçons sont
- Accepter les creux de la vague
- Prendre des risques et des coups
- Saisir le bonheur par intermittence
- Vivre en dauphin, éviter carpes et requins
- Savoir se positionner dans l’adversité
- Devenir le plus léger possible, ne jamais forcer
- Croire en des forces supérieures
En d’autres termes, la technique c’est bien, mais c’est pas tout… en tous les cas, l’article n’en fait nullement cas. Moi, qui n’ai jamais mis les pieds sur une planche de surf, vais-je vraiment survivre au gros rouleau si j’applique ce que cet article me propose? euuuh non biensur que non.
Tout récemment des chercheurs de l’Université du Winconsin-Madison aux Etats-Unis ont montré que le bonheur n’est pas quelque chose qui se traque mais quelque chose qui se cultive… en résumé : plus tu t’entraines et plus compétente tu deviens (pour attaquer les immenses vagues au surf, il va me falloir de l’entrainement).
En lisant celà, mon cerveau manque de collapser. Dans compétence j’entends la même racine que compétition; je me questionne « comment ça compétition et méditation sont compatibles? ». Du coup je file sur internet et je trouve que ces deux termes ont bien la même racine et sont de la même famille (clique ici pour voir la sémantique des mots)… et j’apprends que la compétence est centrée sur l’idée du juste rapport, contrairement aux autres membres de la famille qui se centrent sur la rivalité.
Hahaha je souris; en fait il y a souvent un vilain petit canard dans les familles… mais bon ça c’est une autre histoire.
En fait, c’est fatigant toutes ces théories et j’en profite pour revenir à mes premiers amours : la méditation de pleine conscience. J’aime beaucoup les métaphores et celles du surf m’a bien parlé, mais au bout du compte, j’ai un élan de gratitude envers les sages de diverses traditions, car le processus dans lequel ils me proposent de me fondre, parle bien plus à mon âme que des prouesses de surfeuse.
Ces êtres humains sont devenus des maitres hyper compétents en méditation à force de persévérance, de discipline, de courage et de détermination à modifier leurs schémas mentaux, leur permettant d’être les champions du surf de l’âme. Sais tu qu’au Tibet certains lamas se mettent en méditation pour mourir une fois qu’ils savent leur heure arrivée? et qu’ils ont une telle connaissance des états modifiés de conscience, qu’ils en arrivent à franchir les étapes de la Mort en conscience? En fait, ces lamas investissent également une bonne partie de leur vie, à apprendre à bien mourir ou à aider autrui à dépasser les limitations de la condition humaine…
Il y a tout de même une différence flagrante entre une championne de surf et sa Sainteté le Dalai Lama, tu ne trouves pas?
Là où la méditation est quelque chose qui se vit de plus en plus à travers un processus à chaque instant de sa vie, peu importe ce qui s’y trame, le surf est un exercice ponctuel; là où la surfeuse quitte la vague pour vaquer à ses occupations, la méditante suit le mouvement de la vie en conscience à chaque présent.
Ce qui m’amène à dire que les surfeuses ont beau nous renvoyer une image de liberté, de vitalité, de courage, d’indépendance enrobés de sauce « fun », il n’en reste pas moins que les enseignements restent basiques et limités à une manière de concevoir la Vie très différente de celles des sages charismatiques. Lorsque psychologies reprend la stratégie du Dauphin comme l’un des points clés pour accéder au bonheur, je m’interroge … cette stratégie part du postulat que nous vivons dans un océan peuplé de carpes et de requins qui veulent notre peau… euuuuuh c’est pas tout à fait le message que donnent les sages ou les promoteurs de la méditation de pleine conscience.
Quand je pense que je me voyais championne de planche à voile à douze ans… je suis plutôt partie pour être une bonne surfeuse de la méditation 🙂
En parlant de méditation et de surf, la vidéo virale de Kristina Olivares surfant jusqu’en fin de grossesse est bien différente des rites de naissance dans la tradition tibétaine… finalement, tout tourne autour de notre conception de la vie et de la mort me semble-t-il; du comment je vis les différentes petites morts, les divers deuils sur mon chemin, et du comment vis-je dans le laps de temps qui me sépare des ces deux étapes clé de mon existence : la naissance et la grande mort.
cordialement,
Annette
Liens intéressants :
« mourir dans la sérénité avec le bouddhisme » INREES
« le livre tibétain de la Vie et de la Mort » Sogyal Rinpoche
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